En mars 2010, Pierre Joxe, ex-ministre de Mitterand, (Industrie, Défense, Intérieur), revient sur le devant de la scène médiatique. En exclusivité sur Europe 1, il annonce qu’à 75 ans, il s‘inscrit au Barreau de Paris « pour défendre les maltraités ».
Madame Michu, auditrice moyenne et fidèle de la station radiophonique, se dit : « sympa, le gars. S’occuper ainsi des pauvres gens maltraités, à son âge, c’est-y pas généreux de sa part, ça ! » Elle ne remarque évidemment pas que cet effet d’annonce coïncide étrangement avec la sortie de son livre « Cas de Conscience » dans lequel il révèle tout le bien qu’il ne pense pas du Conseil Constitutionnel dans lequel il siège, en s’asseyant ainsi confortablement sur le droit de réserve qui s’attache en principe à l’exercice des membres de cette Institution. On a beau jouer le généreux socialiste défenseur de la veuve et de l’orphelin, on n’en oublie pas pour cela le sens du marketing, et si on peut profiter du micro complaisant d’Europe 1 pour se faire un coup de pub, pourquoi se gêner.
Janvier 2012, près de 2 ans plus tard donc, Joxe vient nous resservir le même plat : toujours en exclusivité sur Europe 1 (quand on est content d’un fournisseur, pourquoi en changer ?) Joxe nous annonce qu’en tant qu’avocat, il s’est spécialisé dans la défense des enfants. Il ne dit pas « mineurs », mais bien « enfants », c’est ainsi bien plus émouvant. La même Madame Michu, toujours aussi fidèle (et toujours aussi moyenne) auditrice d’Europe 1, se dit : « sympa, le gars. S’occuper ainsi des pauvres gosses, à son âge, c’est-y pas généreux de sa part, ça ! ». Elle ne remarque évidemment pas que cette interview coïncide étrangement avec la sortie de son dernier livre « Pas de quartier ? », dans lequel il révèle tout le mal qu’il pense des réformes de Sarkozy sur la garde-à-vue des mineurs.
On comprend néanmoins, à entendre Joxe, que sa défense des « enfants » est surtout celle des voyous, des petites frappes de banlieue, des racailles avec ou sans permis de séjour, qui volent, tabassent, dealent, enflamment.
On comprend ainsi que son cœur de métier est passé de la défense des maltraités en 2010 à celle des maltraitants en 2012. Pas forcément plus rémunérateur, mais tellement plus « politiquement » respectable !
La petite mamie de Seine Saint-Denis qui s’est faite bousculer et traîner sur 30 mètres par le « petit » Mohamed (17 ans, 1M85, 80 kilos) en scooter (volé) pour avoir voulu résister au vol de son collier en or, peut bien aller porter plainte et, au besoin, se dégoter un avocat anonyme commis d’office et sans expérience, elle trouvera en face d’elle, le sieur Joxe et toute sa notoriété, volant au secours de la pauvre « victime sociale » qu’est Mohamed. Car, Joxe nous l’a bien expliqué dans son interview, ces mineurs délinquants sont des victimes ! Sociales, mais victimes ! Il est donc « républicain » d’adoucir le sort que la Justice leur réserverait si elle avait quelque considération pour cette vieille nantie qui a eu le mauvais goût de travailler pour se payer ce collier, qui a commis la provocation de croiser Mohamed avec ce signe extérieur de richesse au cou, puis eut le réflexe égoïste et déplacé de vouloir résister à l’agression.
Pour argumenter son généreux engagement, Joxe dit regretter l’ordonnance de 1945 du Général de Gaulle qui était tellement plus compréhensive à l’égard des mineurs sortant du droit chemin !
Ainsi donc, pour notre ancien ministre de gauche, (et en fait, pour toute la Gauche en général) le temps, en matière sociétale, s’est arrêté en 1945 ! Joxe ne s’est absolument pas aperçu de l’incroyable dérive de la délinquance des jeunes ! Il ne s’est pas du tout rendu compte de la montée en violence et de la radicalisation des jeunes voyous.
Il n’a pas conscience qu’en 1945, un jeune qui n’avait pas ses chaussures cirées était déjà perçu comme un dangereux asocial, alors qu’aujourd’hui un jeune récidiviste au casier judiciaire gros comme le bottin, mais n’ayant pas encore utilisé de kalachnikov, est juste un petit « sauvageon » !
Dans l’interview, Joxe n’a pas hésité à remonter encore plus loin dans le temps : pour témoigner que la délinquance des jeunes a toujours existé, et donc nier la réalité de cette délinquance en explosion, il a évoqué … Gavroche de Victor Hugo ! Venant d’un ex-ministre de l’Intérieur, la référence historico-littéraire laisse pantois. On hésite entre deux réflexions : ce gars-là se fout-il ouvertement de notre gueule, ou est-il simplement inconscient ?
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