Un
avion se crashe au Mali avec à son bord 54 Français.
Ouf !
Il était temps !
Il était temps que quelque chose de nouveau
se produise pour montrer au bas peuple comme le gouvernemaman socialo
s'occupe de lui.
Depuis
l'accident du minibus dans l'Aube qui a fait 6 morts (sur les
quelques 3 300 qu'on décompte chaque année sur les routes...), on commençait à
se demander à l'Elysée et à Matignon comment on allait bien
pouvoir meubler.
Dans
les médias aussi.
M6,
pour ne citer que cette chaîne, a quand même ouvert son journal du
midi et du soir pendant pas moins de 4 jours sur le sujet. Depuis les
premières images du minibus sous bâche, jusqu'à la marche blanche
(pour célébrer quoi, pour dénoncer qui?), en passant par les
interviews des parents des petites victimes, celles des glandus qui
ne savent rien, qui n'ont rien vu mais qui deviennent d'un seul coup
d'un seul, des personnes intéressantes parce qu'habitant le même
patelin que les victimes, et le déplacement d'un minustre qui n'a
probablement jamais vu un accident automobile de sa vie, le sujet a
bien occupé le temps d'antenne et motivé l'envoi sur place d'une
« envoyée spéciale ». Surtout, ne pas oublier
l'incontournable sondage : « vous sentez-vous en danger
sur les départementales ? » et l'inévitable « polémique
relancée » sur les limitations de vitesse sur les routes
françaises...
Tout
ceci pour apprendre quoi ? Rien. En tout cas, rien dont on
puisse tirer une leçon quelconque. Le conducteur du minibus était-il
musulman ? Ce n'est pas sur M6 qu'on le saura. L' hypoglycémie
qui aurait causé son assoupissement pourrait-elle être causée par
sa pratique du ramadan ? La question, et a fortiori la réponse,
sont à des années-lumières des préoccupations des journaleux
« enquêteurs » de la chaîne.
Hollande
Ouille s'est fendu d'un communiqué sur le perron de l'Elysée pour
dire... euh, pour dire... euh.. pour dire, sans doute, que c'était
très triste, et que
toute-la-lumière-serait-faite-sur-ce-terrible-drame, ou quelque
chose comme ça. De toutes façons, on a déjà oublié et on s'en
fout, la parole présidentielle ayant désormais la portée d'un pet
de moineau sur l'équation cosmique.
On
en est bien là aujourd'hui, époque sidérante où un accident
automobile comme il s'en produit des dizaines et des dizaines chaque
année, mobilise un président de la république, son gouvernement et
toute la presse pendant plusieurs jours. Avouez qu'on vit quand même
une époque formidable : nos plus hautes autorités en sont
réduites, pour s'occuper et justifier leurs postes, leur train de
vie, leur émoluments et le folklore qui les entoure, à tourner en
boucle sur un banal fait divers qui ferait, sous d'autres cieux, ou
en France à d'autres époques, un entrefilet dans une gazette
locale. Et puis, ce n'est pas comme si le pays avait des problèmes
menaçant sa survie à traiter.
Donc,
cet accident aérien sur le Ouagadougou-Alger vient à point nommé.
Sinon, le gouvernement aurait été en grave crise de communication. C'est
d'ailleurs pour cela qu'on appelle ces réunions des « réunions
de crise ». Comme le précise le journal de M6, Hollande Ouille
a organisé pas moins de trois réunions de crise depuis jeudi sur le
sujet, la dernière ayant pour but de préparer la venue des familles
des victimes du crash.
Pourquoi
faire venir ces familles ? Pour les réconforter !
On a
pourtant du mal à imaginer comment se farcir un déplacement jusqu'à
Paris, devoir se mettre sur son trente-et-un pour la circonstance, et
se coltiner, entre deux petits fours, l'inévitable allocution
ânonnée par l'ex-maire de Tulle au sourire benêt et faussement
contrit par convention, pourraient être de nature à
réconforter quiconque touché par ce drame.
Mais
cette rencontre, qui n'a évidemment absolument rien à voir avec une
tentative de récupération politicienne ou une quelconque opération
de com, a donc mobilisé un président et six ministres, dont, allez
savoir à quel titre, la Taubira de la Justice et Cazevide de
l'Intérieur.
Saucisson-Pinard
a eu vent de ce qui s'est dit pendant cette réunion de crise d'une
heure et demi. En voici le compte-rendu fidèle :
Hollande
Ouille : « Bon, bah, voilà, comme on l'a vu lors de nos
deux dernières réunions de crise, un avion s'est crashé au Mali
avec plus de cinquante de nos ressortissants. Gantzer (responsable
de la communication à l'Elysée, NDS-P) m'a dit que ça serait bon
pour mon image de faire venir les familles concernées à l'Elysée ».
Fleur
Pellerin, ministre des Français de l'étranger : « Ah
bon ? mais qu'est-ce qu'on va leur dire ? »
Hollande
Ouille : « Ben, on va leur dire qu'un avion dans lequel se
trouvait un membre de leur famille s'est écrasé en Afrique, et
qu'il n'y a aucun survivant... »
Hollande Ouille :
« Ben non, on n'en sait rien. »
Le
Drian, ministre de la Défense : « Pourvu que ça soit pour une raison technique ou
météorologique et pas parce qu'il s'est fait descendre par des
tchouks-tchouks islamiques, sinon, on va encore avoir l'air con ! »
Taubira :
« Monsieur le P'ésident, qu'est-ce que je fais là, dis donc,
p'ésentement ? J'ai pas que ça à fai'e, en ce moment, avec
toutes ces a''estations des manifs p'o-palestiniennes, j'ai plein de
petites f'ipouilles à fai'e 'elâcher, là. »
Hollande :
« Vous en faites pas, Christiane, on fera savoir partout que
vous avez assisté à ces réunions compassionnelles, ça sera bon
pour votre image, à vous aussi... »
Cuvillier,
ministre des Transport : « Alors, on leur dira quoi, aux
familles ? »
Cuvillier, ministre des transports : « On
les fait venir pour leur dire qu'on ne sait rien ? »
Hollande Ouille :
« On les fait venir pour leur exprimer notre com-pas-sion »
dit-il en séparant bien les syllabes. « Ben oui, c'est
important pour eux de savoir qu'on s'occupe du problème. Et surtout
très important pour tous les Français qui nous regardent! »
Fabius, étranger aux
affaires, qui se réveille en sursaut : « Mais concrètement, on fait quoi pour s'en
occuper, du problème? »
Hollande Ouille :
« J'envoie une équipe de médecins spécialistes d'autopsie
et d'identification post mortem et de dentistes pour pouvoir
identifier les corps. Ainsi nous saurons qui sont les victimes de
l'accident. »
Fleur Pellerin se
risque : « La liste risque d'être assez proche de celle
des passagers à l'embarquement, non ? »
« Sûrement, »
concède Hollande Ouille. « Mais ça permettra d'attribuer les
morceaux retrouvés à leurs propriétaires légitimes. »
Fabius : « C'est
ce qu'on va dire aux familles des victimes pour les réconforter ? »
Taubira : « Bon,
l'impo'tant, c'est de di'e et fai'e savoi' qu'on les 'eçoit à
l'Elysée. Le 'este, on s'en bat les paupiè'es avec des pelles à
gâteau ! »
Hollande
Ouille : « Bon, bah voilà voilà. C'est tout ce que
j'avais à vous dire. Mais ne partez pas tout de suite, on est censé
travailler dur pour cette venue des familles. Souvenez-vous qu'il
s'agit d'une réunion de crise. Il y a plein de journalistes dehors
qui vous attendent. Alors on laisse passer encore une petite heure,
et quand vous sortez, vous prenez un air concentré et attristé et
surtout, pas un mot à la Presse. »
Fabius :
« En même temps, je ne vois pas bien ce qu'on pourrait leur
dire... »
Hollande
Ouille, se tournant vers Pellerin : « Bon, sinon, la
famille, chez vous, ça va ? Vous allez où pour les
vacances ? »