Il était une fois un mec qui jouait au ballon avec des copains de sa tribu. Il s'appelait... En fait, on s'en fout comment il s'appelait, parce que de toutes façons, il avait un nom à coucher dehors avec un billet de logement. Mais bon, pour que cela soit plus clair, appelons-le Machin.
Et le mec Machin était triste. Très triste. Et il avait toutes les raisons d'être très triste. Imaginez : Il avait perdu son job, n'avait plus un rond, il allait être expulsé de son domicile parce qu'il ne pouvait plus payer son loyer. SDF, il savait qu'il allait devoir aller au resto du cœur pour pouvoir manger un peu.
Voyant sa tristesse infinie, une espèce d'ado passablement attardé, se mit à courir vers lui avec enthousiasme pour lui prodiguer du réconfort. Appelons-le Manu. Manu s'était déjà fait remarquer au bord du terrain où Machin tapait dans son ballon, par une excitation largement surjouée. Laquelle excitation avait sans aucun doute davantage à voir avec un abus de cocaïne qu'avec l'amour du jeu de ballon.
Bon, tout ceci n'est pas l'exacte réalité.
Non, Machin n'était pas triste parce qu'il était sans le sou. Non. En fait, c'est même tout le contraire : il a un pognon de dingue. Il touche des millions d'euros chaque mois. Machin, le gars qui tapait dans un ballon, était un authentique multi-millionnaire.
Mais c'est vrai qu'il était triste : avec les potes de sa tribu, il avait perdu! Ceux contre lesquels ils avaient joué à la baballe, avaient mieux joué qu'eux. Terrible, non ? Si la compassion ne vous étreint pas, c'est que vous êtes juste un sans-coeur !
Par exemple, Manu, lui, a été très ému de la détresse de ce millionnaire. Aussi s'est-il cru obligé d'aller le réconforter, toute affaire cessante. Le réconforter, ça veut dire aller le voir alors qu'il ne demandait rien à personne, assis sur l'herbe, les yeux dans le vague, à se maudire d'avoir perdu à son jeu de ballon. Aller le voir, mais pas seulement. Manu tenait absolument à le tripoter partout, avec un grand sourire aux lèvres. Ce qui est plutôt étrange. En général, quand on veut montrer à quelqu'un qu'on partage sa peine, on a la même expression de tristesse que lui. Mais là, Manu était visiblement épanoui quand il le prenait aux épaules, frottait son dos, caressait sa nuque, était à deux doigts de lui rouler une pelle. Curieux, non ?
De toute évidence, Manu jouissait littéralement à tripoter Machin. Sûr que ça lui faisait des choses partout, sans doute aussi dans le bas-ventre, à papouiller ainsi le multi-millionnaire Machin triste. Ça lui rappelait une rencontre d'il y a quelques mois, aux Antilles, où il avait déjà eu l'occasion de tripoter des autochtones torse nu, qui sentaient bon la sueur animale et exotique. Il avait pris bien soin de se faire photographier, histoire de garder un souvenir de cet instant émouvant.
Le plus étrange, c'est que si Machin semblait peu ravi de ces marques d'affection équivoques, il ne faisait rien non plus pour repousser Manu le papouilleur. Preuve s'il en est, qu'on peut très bien savoir taper dans un ballon sans pour autant avoir ce qu'il faut dans la culotte pour envoyer bouillir une pédale trop entreprenante. Ou peut-être pensait-il qu'après tout, le tripoteur en question avait quand même dépensé pour un demi-million d'euros de billet d'avion pour venir lui faire ces papouilles, et que finalement, cela aurait été injuste de le priver d'un tel plaisir après une telle dépense. Même si la dépense en question n'avait pas été réglée par Manu lui-même mais par un dénommé Tribuable. Lequel est très con, soit dit en passant, pour permettre à cet ado immature de dépenser ainsi, sans jamais s'arrêter, son pognon à tort et à travers. Mais c'est un autre sujet.
Bref, le seul à prendre son pied dans cette histoire de fin d'année, ce n'était pas celui qui tapait dans un ballon avec ses pieds, mais c'était bien Manu le tripoteur.
Pourtant, Manu a déjà un petit copain à la maison : Jean-Michel. Il est sympa, Jean-Mich', et puis il adore se déguiser tout le temps. Mais bon, le copain Jean-Mich', il n'est plus tout jeune. Et côté musculature, à tripoter, évidemment, ça n'a rien à voir avec celle de Machin. Sans parler de l'odeur forte et animale du mec en sueur qui évoque à la fois celle du fauve de la savane qui bondit sur sa proie et celle du phacochère qui subit cette attaque... Et pour ce qui est de cet attribut sexuel dont Manu raffole, il est clair que Jean-Michel n'est pas à la hauteur de Machin.
La moralité de cette histoire sordide qui met mal à l'aise ? Un ado camé et à la sexualité en errance peut très bien ne pas hésiter à exploiter la tristesse aussi dérisoire qu'éphémère d'un multi-millionnaire brièvement contrarié, pour prendre son pied publiquement pendant quelques minutes devant des caméras du monde entier. Une conduite qui passionnerait sans nul doute un psychiatre, mais laisse le public dans une profonde affliction et désespérance.