Jamais la Presse dans son ensemble n’aura été aussi partisane lors d’une élection présidentielle que lors de celle de 2012. Sauf peut-être entre les deux tours de la présidentielle de 2002, quand il s’est agi de faire front commun (ah les braves démocrates !) contre le candidat du Front National. C’est comme si un Président de droite décomplexée avait cristallisé la frustration longtemps accumulée dans les bureaux d’une presse globalement de gauche. L’exaspération de cette presse était à son comble au terme de 10 ans de gouvernement dit de droite. Après la surprise d’un candidat socialiste absent d’un second tour en 2002, puis l’échec de la candidate de 2007, il était temps, lui a-t-il semblé, de faire foin de toute objectivité, d’oublier toute éthique journalistique, toute retenue et d’attaquer le Président sortant avec une indicible mauvaise foi tout en soutenant le candidat socialiste avec un zèle plus ou moins appuyé.
Il est vrai que Sarkozy, de par sa personnalité, a tout pour agacer un gauchiste moyen : spontané, prompt à dire ce qu’il pense, y compris lorsque c’est politiquement incorrect, d’une sensibilité à fleur de peau, il a tenté d’imposer un nouveau style de présidence, plus moderne, plus décontracté, à l’américaine. C’est un homme qui, lorsqu’il connaît un succès, va le fêter dans un bon restaurant. C’est un homme qui préfère les Rolex aux Swatchs, et se pare de Ray-Ban quand il fait soleil : c’est dire l’incongruité du personnage… ! Toujours est-il que Sarkozy est de droite philosophiquement et il est « cash » dans son style, comme disent les jeunes. A mille lieues de la présidence quasi-monarchique d’un Mitterrand compassé qui sur-jouait la hauteur et l’inaccessibilité arrogante de Sa Majesté du Cul-Serré.
C’est précisément cette personnalité hors du commun qui a d’abord surpris, voire subjugué puis agacé, et enfin exaspéré la Presse de gauche. Cette animosité à l’endroit du Président se trouvait d’autant plus encouragée qu’elle trouvait une large compensation économique, parce que, c’est un fait : un titre sur Sarkozy fait vendre ! Beaucoup plus que n’importe quelle personnalité de gauche. Selon l’aveu quasiment contraint de Joffrin du Nouvel Obs, Sarkozy fait vendre car « c’est un personnage de roman ». Alors la Presse écrite s’en est donné à cœur joie, enchaînant les « unes » plus excessives, plus grotesques, voire injurieuses, les unes que les autres.
Certaines bonnes âmes de gauche (Saucisson-Pinard en connait !) nient l’orientation de la quasi-totalité des médias français, et leurs contre-exemples sont toujours les mêmes : le Figaro et TFI. Point final. Il n’y en a pas d’autres. Et à les entendre, quand un support n’est pas de gauche, c’est qu’il est forcément de droite. La notion même d’organe de presse indépendant qui se contenterait de donner des faits et des éclairages objectifs sur des évènements ou des personnalités politiques, leur est parfaitement étrangère. Et les bonnes âmes en question oublient l’orientation fortement marquée à gauche de : Marianne, L’Express (qui a livré obligeamment aux manifestants en liesse du soir du 6 mai, des panneaux de sa une avec le portrait du vainqueur, voir photo ci-dessus), du Point, du Nouvel Obs, de Libération, du Canard Enchaîné, du quotidien Le Monde, de France 2, France 3 et des autres services dits « publics » de l’audiovisuel inféodés au syndicalisme politisé, des radios France Intox, Europe et RMC (voir article « Hervé Gattegno, journaliste opposé à l'information") sans même mentionner les officines tels que Médiapart ou Rue89, qui tous et toutes, ont donné dans l’anti-sarkozysme le plus exacerbé.
Bref, tous les médias ont, commercialement, largement profité de l’ère Sarkozy, y compris le Figaro, parce qu’il était perçu, quant à lui, comme un îlot de sérénité pour les lecteurs soucieux d’échapper à cet océan d’hystérie anti-sarkozyste.
Libération, pour ne citer que ce support le plus représentatif de la bonne parole socialiste, a ainsi connu en 2011 une hausse de sa diffusion de 5,35%. Une croissance annuelle que lui envieraient, par les temps qui courent, beaucoup d’entreprises.
Sarkozy décidant de se retirer de la vie politique, la donne va dramatiquement changer. Bien sûr, il sera facile, au début, à ces médias de gauche de surfer sur l’état de grâce que va connaître, comme il se doit, la nouvelle présidence. Mais après ? Il n’est pas besoin d’être grand clerc pour deviner que cet état de grâce sera court, et que la dure réalité viendra bien vite s’opposer à l’angélisme du nouvel occupant de l’Elysée. Ne nous attendons pas non plus à ce que cette Presse autiste fasse le constat d’un pays en train de glisser économiquement sur la pente grecque, et socialement dans l’ambiance délétère d’une civilisation décadente rongée par le cancer d’une immigration de culture régressive, aussi envahissante qu’appauvrissante.
Quant à la personnalité de Hollande Ouille, ce n’est assurément pas elle qui fera vendre. Reconnaissons qu’elle n’est pas de nature à concentrer longtemps l’intérêt du bon peuple. Le personnage est falot, cruellement « normal » comme il le reconnaît lui-même, et il ne sera bientôt plus que le jouet ahuri d’évènements qui le dépasseront de très haut.
Avant 1981, le Matin de Paris était l’organe de presse le plus proche de la ligne du parti socialiste. Tant que Mitterrand était dans l’opposition, il avait le vent en poupe. Dès lors que le PS était aux commandes, il a vu ses ventes chuter vertigineusement, jusqu’à déposer son bilan en 1987. Le secteur de la presse écrite se portait pourtant globalement mieux à l’époque que de nos jours, et les cycles économiques s’accélérant, on peut douter que tous les journaux d’aujourd’hui survivront aussi longtemps. Ça serait assez comique que certains organes de presse anti-sarkozyste soient les premières victimes collatérales de l’ère Hollande ! Comique, et avouons-le, plutôt jouissif !
Certains de ces médias reconnaissent que l’exercice va désormais s’avérer plus difficile. "C'est toujours inconfortable d'être un journal proche du pouvoir », confirme Maurice Szafran, le directeur de Marianne. Renaud Dely, directeur de rédaction du Nouvel Obs, s’engage, lui, à être « une vigie critique », à éviter à tout prix d’être « un supporter aveugle ». On a envie de lui dire : Chiche ! Il aura du boulot ! Ça serait même une sacrée conversion ! Car en 1981, le slogan de cet hebdomadaire était « Bien placé pour le savoir ». Sa ligne éditoriale était tellement proche de Mitterrand, qu’il se revendiquait être la « voix de son maître ». Et il a frôlé la faillite.
D’autres, à l’instar de Christophe Barbier, directeur de l’Express, ont eu récemment des aveux confondants de naïveté benoîte : "Si Hollande est élu, nous serons plus sur le fond que sur la forme". En d’autres termes, « chers lecteurs, tant que l’hôte de l’Elysée n’était pas de notre bord, on vous a abreuvé d’informations superficielles sans réelle importance, (d’où les affaires du Fouquet’s, les dénonciations de bling-bling et autres fadaises) et on vous a privé de toute analyse de fond. Mais maintenant que le Président est celui que nous avons choisi (pour vous), nous allons faire notre boulot sérieusement! » Et Barbier d’en rajouter une couche en reconnaissant avec regret que malheureusement « le fond, ce n’est pas très vendeur… ! » Peut-on être plus cynique ? Les lecteurs et abonnés de l’Express apprécieront d’avoir ainsi été pris pour des jambons. Mais pour être tout à fait juste, cet aveu, très révélateur, pourrait être celui l’ensemble des médias français, parfaitement indignes d’une démocratie moderne.
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